Pourquoi le small talk c’est compliqué ?

A propos du small talk (le fait de parler « de tout et de rien » ; de discuter sur des sujets superficiels, ou en restant à un niveau superficiel…).

Le small talk est souvent un problème pour les personnes autistes (entre autres).

Déjà, parce que pour une personne autiste c’est pas une façon naturelle de faire la conversation, de discuter, et même de penser
(certaines personnes autistes arrivent à bien donner le change, voire à s’y habituer, mais ça sera jamais naturel comme pour une personne NT).

Donc concrètement, dans un groupe de personnes NT qui fait du small talk ensemble, une personne autiste va en général soit se mettre à parler (à fond et « trop ») d’un sujet qui l’intéresse ou qu’elle maîtrise, soit s’intéresser (à fond et « trop » encore) à un sujet dont quelqu’un d’autre parle.

Exemple : une personne NT qui est à côté dit en passant « Je joue de la guitare », et elle le dit en mode small talk (elle a pas envie d’avoir une grande discussion sur la guitare, c’est juste pour passer le temps et échanger des infos avec les autres).
La personne autiste va se mettre à lui poser plein de questions sur la guitare (quel type de guitare, quel type de musique tu joues, comment tu joues tel accord ou autre).

Ou alors, la personne autiste va juste ne rien dire (ou parler vraiment très peu).

En bref, une personne autiste joue très rarement le « jeu » du small talk (et si elle le fait c’est seulement pour cacher son autisme / ne pas déranger les NT / leur faire plaisir).

Pourquoi ?

Première raison = Parce que pour faire du small talk il faut DE L’INSPIRATION.
Cela peut avoir l’air bête, mais c’est vrai.
Moi, quand je suis dans une discussion small talk, je ne sais pas quoi dire. Parce que je n’ai pas/très peu de choses superficielles et légères (mais susceptibles d’intéresser les gens quand même) à dire. A chaque fois je dois me creuser horriblement la tête si je veux trouver une chose suffisamment légère à dire.
Cela ne me vient PAS naturellement.

De plus, en général une conversation small talk va survoler plein de sujets très vite, (la météo, les bouchons, le cours de water polo d’André, le cours de guitare de Fatima, etc), mais sans s’arrêter sur aucun de ces sujets.
Chacun de ces sujets sera « bouclé » en quelques minutes.

Donc le temps de trouver un truc pertinent mais léger à dire sur un sujet (par exemple, le water polo d’André), le groupe sera souvent déjà passé au suivant (le cours de guitare de Fatima).

Seconde raison = Parce que ça peut être ennuyeux, chiant voire carrément pénible pour une personne autiste de faire du small talk.
MÊME une qui sait donner le change (savoir le faire pour les autres ne veut pas dire qu’on passe un bon moment…).

Troisième raison = Parce que souvent, une personne autiste (introvertie ou extravertie) ne va pas parler pour ne rien dire.
Elle va parler pour dire des choses intéressantes de son point de vue, ou pour poser des questions, apprendre des choses, ou avec un but spécifique (exemple : demander une info administrative à un bureau d’information),
mais elle ne va pas « parler pour meubler ».

Cela ne sera pas spontané pour elle, et surtout cela n’aura pas vraiment de SENS pour elle.

Moi-même, j’ai compris très tardivement que faire du small talk (en jouant vraiment le jeu) est une règle sociale attendue et importante pour les NT, et parfois du coup j’essaye de le faire (si je trouve l’inspiration…),
mais ça n’a toujours pas de sens intrinsèque pour MOI (si je le fais c’est vraiment seulement pour ne pas me retrouver considéré comme un paria), et ça n’est toujours pas vraiment un bon moment (je le fais seulement avec des gens avec qui j’ai de VRAIS bons moments par ailleurs, pour ne pas perdre leur amitié).

Bref.
Le small talk est rarement une chose agréable ou qui a du sens pour une personne autiste… Et surtout c’est rarement techniquement facile (techniquement dans le sens : trouver quoi dire, comment, à quel moment, etc).

Et ce dernier point n’est souvent pas compris. Surtout pour une personne autiste avec des intérêts spécifiques intellectuels, qui est capable de parler pendant des heures dessus (sciences humaines, sciences naturelles, histoire, art…).
Parce que « Si tu es capable de parler de physique, tu peux parler de la pluie et du beau temps ».

Mais non en fait, ça ne marche pas comme ça.

Épinard.